Le-plus-grand-groupe-français. Voilà le qualificatif le plus répandu dans l'Hexagone à propos du groupe Téléphone. Au milieu des années 1970, alors que la déferlante punk envahit l'Angleterre, la chanson française ronronne un peu. La secousse sismique que vont provoquer les quatre musiciens va marquer pour longtemps toute une génération de jeunes Français.
Les débuts du groupe remonte à une date précise : 12 novembre 1976.
Jean-Louis Aubert, 21 ans est chanteur, auteur et guitariste. Fils de sous-préfet, réfractaire à l'école, il s'engage très tôt dans la musique et c'est au côté de Richard Kolinka, 22 ans batteur, qu'il débute réellement. Avec la formation de ce dernier, Sémolina, ils enregistrent un 45 tours "Et j'y vais déjà" vite enterré par la maison de disques WEA. Expérience sans lendemain et déception des intéressés. Rencontrés en 1970 lors d'un concert du groupe anglais The Who, Louis Bertignac, 22 ans, guitariste de talent qui a joué avec Jacques Higelin dès 1975 et Corine Marienneau, 24 ans, devenue bassiste un peu par hasard se joignent au duo pour un concert quasiment improvisé au Centre américain à Paris le 12 novembre 1976.
Quelques reprises de groupes anglais comme les Rolling Stones ou Led Zeppelin, accompagnées d'esquisses de chansons originales forment leur répertoire. Quelques centaines de spectateurs sont là pour voir exploser une énergie sans borne, transmise par un rock juvénile. La machine est lancée.
Un sonorisateur et un manager sont recrutés parmi leurs copains. Et le quatuor jusque-là sans nom, s'appelle désormais Téléphone.
Après un concert donné dans le métro parisien en mars 1977 qui provoque une grosse pagaille dans les couloirs, ils font la première partie de la tournée du groupe anglais, Eddie & The Hot Rods, à qui ils volent finalement la vedette. Quelques semaines plus tard, remplaçant in extremis les New-yorkais de Blondie en première partie du groupe Television, Téléphone monte pour la première fois, sur la scène de l'Olympia à Paris.
Un concert au Bus Paladium à Paris le 8 juin 1977, leur donne l'occasion d'enregistrer un 45 tours auto-produit, avec les deux titres "Hygiaphone" et "Métro c'est trop". Dans un premier temps, ce 45 tours est distribué à la sortie de leurs spectacles. En août, ce groupe prometteur signe un contrat avec la maison de disques Pathé-Marconi, pour trois albums.
Le premier est enregistré à Londres au Studio Eden, avec le producteur des Sex Pistols, Mike Thorne. Nous sommes à l'automne 1977. Le 33 tours "Téléphone" sort fin novembre. La quasi totalité des chansons est signée Aubert. Elles sont chantées en français, une des raisons de leur succès dans l'Hexagone. Une première véritable tournée est organisée dès décembre avec entre autres, un concert gratuit devant 6000 personnes à l'Hippodrome de Pantin à Paris.
"Hygiaphone" est le premier titre de Téléphone à entrer dans les hit-parades français. Le groupe participe au très grand festival de rock français à Lyon en juillet 1978. Il y retrouve les musiciens de Bijou et de Starshooter. Après ces quelques mois très remplis, les quatre jeunes gens n'enregistrent leur second album que début 79.
"Crache ton venin" est enregistré à Londres. La pochette est signée Jean-Baptiste Mondino, photographe de talent et très apprécié dans le monde du rock pour ses idées originales. C'est ainsi que par une astuce de packaging, on peut voir une photo des membres du groupe en tenue d'Adam et d'Eve. Ce genre de provocation qui nous ferait sourire plusieurs années après, fait partie de l'image médiatique entretenue par Téléphone.
Les neuf titres de "Crache ton venin" sont autant de textes sur les révoltes des adolescents et sur le rejet d'une société injuste. Ils se déclinent à l'aide de courtes histoires comme dans "Fait divers" ou "J'suis parti de chez mes parents". Mais c'est "la Bombe humaine" véritable hymne d'une génération, qui reste sans doute leur plus grand tube. Plus de 600.000 albums seront vendus.
En mai et juin, le quatuor part en tournée avec un passage mémorable le 7 juin au Palais des Sports à Paris. C'est, en fait lors de la Fête de l'Humanité à la Courneuve, rassemblement annuel du Parti Communiste Français, que leur véritable consécration a lieu : plus de 100.000 personnes sont là pour les acclamer.
En France, on peut considérer l'émergence de Téléphone comme un véritable phénomène de société. Début1980, ils entreprennent une tournée en Italie, Espagne et Portugal. Du 15 au 30 mars, ils partent en Amérique du Nord, passent à Toronto et même New York au Mudd Club, où leur prestation est malheureusement assez médiocre pour cause d'ébriété collective.
De retour des Etats-Unis, ils sont là pour la sortie du film "Téléphone public" de Jean-Marie Périer, photographe attitré du magazine "Salut les Copains" dans les années 1960. Cela donne presque deux heures de musique et d'interview avec Aubert, Bertignac, Kolinka et Corine Marienneau. Le film est même présenté durant le Festival du cinéma à Cannes.
A l'aube des années 1980, leur popularité est immense. Ils concoctent dès l'été 1980, un troisième album "Au cœur de la nuit". Celui-ci est enregistré entre Paris et New York. Les thèmes abordés semblent s'être un peu élargi : nuit et solitude sont au programme de ces quelques treize titres. Mais le titre phare de cet album est sans conteste "Argent trop cher", 45 tours sorti aussi en Angleterre et même traduit dans la langue de Shakespeare !
Début 1981, la bande à Aubert sillonne la France avec une infrastructure de déplacement délirante : trois cents projecteurs, deux camions semi-remorque, un bus, un mini-bus, 30 personnes et quelques 14.000 watts de sono ! Ils se produisent même au concert gratuit Place de la République le 10 juin, organisé pour fêter la victoire de François Mitterrand aux élections de mai. Durant cette tournée digne d'un grand groupe anglo-saxon, Jean-Louis Aubert compose "Ce soir est ce soir", titre qui figure sur l'album suivant "Dure limite".
En juin 1982, cet opus sort chez Virgin. En effet, le contrat avec Pathé terminé, Téléphone s'est mis à la recherche d'une nouvelle maison de disques. En précommande, il est déjà Disque d'or soit 120.000 exemplaires. Le très beau titre "Cendrillon" est signé et interprété par Louis Bertignac, "le Chat" Corine Marienneau et le reste Aubert, comme d'habitude. "Ça c'est vraiment toi" sort en 45 tours. Nouveau grand succès avec clip vidéo à l'appui. La totalité des ventes de l'album atteindra 700.000 exemplaires.
Le groupe anglo-saxon le plus connu de la planète, les Rolling Stones invite Téléphone à faire la première partie du concert qu'il donne à Paris à l'Hippodrome d'Auteuil le 14 juin 1982. Devant 80.000 spectateurs et malgré des problèmes techniques, les quatre parisiens s'en tirent avec les honneurs. Avant la fin de l'année, ils repartent en tournée, ponctuée par une chute inopinée de Louis Bertignac qui se casse la clavicule. Obligés de changer quelques dates, ils assurent pourtant trois concerts à l'Hippodrome de Paris les 4, 5 et 6 novembre. En tout plus de 145.000 personnes auront vu Téléphone sur scène durant la tournée de 1982.
Malgré une popularité croissante et un succès inestimable, la cohésion du groupe commence à se dégrader. Problème d'ego, pression des médias et des fans ou simplement usure professionnelle, les quatre membres du groupe semblent se poser des questions. Une rumeur de séparation circule.
Au printemps, ils repartent en tournée aux Etats-Unis mais les Américains ne s'intéressent absolument pas aux "frenchies". Les Canadiens les accueillent un peu mieux, mais le monde anglo-saxon reste hermétique aux textes en français, quant aux quelques textes traduits en anglais, le résultat n'est pas très heureux.
L'album "Un autre monde" sort en 1984. Téléphone paraît avoir retrouvé équilibre et sérénité. Les titres "New York avec toi" et "Electric city", sortis en simple cèdent un peu à la facilité : plus commercial, le ton est moins rock. Le groupe part alors et une fois de plus sur les routes de France pour une gigantesque tournée. L'année 85 voit la sortie d'un nouveau simple "Le jour s'est levé". Le texte est signé Jean-Louis Aubert et la musique, Téléphone.
Après neuf ans de vie commune, les membres du groupe aspirent à mener des projets en solo : Corine signe des textes pour la bande originale de "Subway" de Luc besson, Richard monte le label Kod et Jean-Louis participe au disque pour l'Ethiopie des Chanteurs sans Frontières.
En avril 1986, Jean-Louis Aubert annonce la dissolution du groupe. En décembre de la même année, Virgin sort un double album live sur lequel on retrouve l'énergie pure transmise par les musiciens. La communion du groupe avec son public est ici évidente.
En 1991, sort une compilation de Téléphone "Rappel I" qui se vendra à presque un million d'exemplaires, démontrant ainsi la place prépondérante de la bande dans le milieu du rock français..
Bien qu'il arrive au groupe de se reconstituer le temps d'une session entre amis, des tensions, que Louis Bertignac qualifie de « quasiment inexplicables », subsistent entre Jean-Louis Aubert et Corine Marienneau. Cependant, le groupe s'est déjà reformé lors d'un concert de Louis Bertignac au Bataclan en 1994. Bertignac et Aubert se sont d'ailleurs retrouvés de plus en plus régulièrement, comme à l'Olympia en 2005, où Aubert est monté sur scène jouer quelques morceaux avec Bertignac, ou encore au Téléthon de cette même année.
Le 2 décembre 2006, Jean-Louis Aubert, Louis Bertignac et Richard Kolinka se retrouvent sur le plateau de Taratata sur France 2 pour une version de Ça (c'est vraiment toi).
Dans une interview du 8 avril 2008, Jean-Louis Aubert affirme avoir « donné son accord » pour une reformation, « mais je veux que ça se fasse dans le plaisir », souligne-t-il. Il ajoute : « Ce n'est pas refaire qui m'intéresse, mais faire des nouvelles chansons. »
De nouvelles rumeurs de reformation naissent le 5 juin 2010, mais elles seront démenties quelques semaines plus tard. Le 28 juin suivant, selon la radio Europe 1, le groupe doit se reformer (sans Corine Marienneau) pour trois concerts au Stade de France en 2012. Le jour même, Louis Bertignac publie une dépêche réfutant ces affirmations, mais assure que le groupe se reformera « avant de mourir » (expliquant que lui et Aubert sont, pour le moment, trop occupés pour les trois ans à venir).
Le 27 juillet 2010, Louis Bertignac déclare dans une interview à Nice-Matin :
« On en a parlé avec Jean-Louis et on se disait qu’on serait vraiment cons de mourir sans le faire. Une tournée est envisagée d’ici à 2013. Le temps de la mettre au point. »
Dans un article du 17 septembre 2010, Le Parisien annonce qu'au moins dix concerts seraient prévus pour 2012 (dont trois au Stade de France). Réagissant au micro de la radio Le Mouv', Jean-Louis Aubert déclare : « Il y a beaucoup de vrai, mais l'article est faux car ce n'est pas pour 2012. » Il précise aussi que « ce qui est vrai, c'est qu'on en a parlé entre nous, que notre manager a pris des contacts avec différents tourneurs pour étudier les propositions, mais c'est tout pour l'instant », en soulignant que « rien n'est signé ».
Le 10 décembre 2013, le groupe se reforme temporairement le temps d'une soirée privée pour un concert d'environ 45 minutes au Bus Palladium. Jean-Louis Aubert, Richard Kolinka et Louis Bertignac, rejoints par Axel Bauer à la basse, ont joué entre autres La Bombe humaine, New York avec toi, Flipper, et Un autre monde.
Le groupe s'est réuni partiellement de façon éphémère pour un concert au Point Éphémère le vendredi 11 septembre 201531 sous le nom « Les Insus ». Les Insus étaient composés d'Aubert, Bertignac et Kolinka mais sans la bassiste Corine Marienneau remplacée à la guitare basse par Aleksander Angelov. Un autre concert se déroule à Lille le 15 septembre. Les insus donnent également un concert à Lyon, au Transbordeur, le 6 octobre 2015.
Le dimanche 29 novembre, le nouveau groupe annonce une véritable tournée en France (toujours sans Corine évidemment) pour l'année 2016.
Source : RFIMusique /wikipedia
Biographie fournie par : Webmaster ABC-TABS
Dernière modification : 30/11/2015