Kitsch et moderne, les Rita Mitsouko forment le couple le plus singulier du rock français. Mélangeant humour, folie et dérision, ouverts à toutes les influences musicales, Fred Chichin et Catherine Ringer ont su traverser les années 1980 et 1990 avec une grande aisance. "Marcia Baïla", leur hymne latino-rock, a donné à ce duo branché (malgré eux) son titre de noblesse auprès du grand public.
Catherine Ringer est née le 18 décembre 1957 à Suresnes. Entre un père artiste-peintre et une mère architecte, Catherine et son frère sont élevés dans une ambiance musicale et chaleureuse. Très jeune, elle se met à la musique et s'initie sur le tas à quelques instruments. Pas franchement passionnée par les études, elle quitte l'école à 15 ans. Elle multiplie alors les expériences artistiques du cinéma au théâtre, en passant par la danse et le chant avec le compositeur Yannis Xénakis.
Frédéric Chichin, dit Fred, est né le 28 avril 1954 à Clichy. Son père est cadre dans une entreprise de travaux publics et sa mère est femme au foyer, mais tous les deux sont passionnés de cinéma. Son enfance est plutôt bohême. Fred ne s'intéresse pas plus à l'école que Catherine. Il préfère la musique et joue un peu de batterie, mais surtout de la guitare dont il devient un interprète virtuose. Après son départ du lycée, il fait quelques petits boulots puis part sur la route à travers la France, mais aussi au Maroc ou en Angleterre où il vit dans des squats. Pendant un an, outre divers petits métiers, il travaille avec un marionnettiste pour lequel il compose des musiques. A son retour sur Paris, il découvre la musique électronique et se lance dans la recherche expérimentale avec Nicolas Frize, créateur du centre de recherche musicale de Vierzon, où il fait un stage. Enfin, il se tourne vers un rock plus dur et monte quelques groupes dont Fassbinder avec Jean Néplin ou Gazoline. Il travaille même avec le groupe mythique Taxi Girl.
Lorsque Catherine et Fred se retrouvent sur une comédie musicale, "Flash Rouge", en 1979 à Montreuil dans la banlieue parisienne, ils s'entendent immédiatement. Ils partagent la même tendance pour la contradiction, le décalage voire la provocation. Fred forme Catherine à la composition musicale et ils mettent très vite en commun leurs innombrables expériences. Après quelques tentatives de travail en groupe, c'est finalement en duo qu'ils choisissent de fonctionner. Le couple travaille chez lui et c'est dans leur cuisine que naissent leurs premiers titres. De concert en concert, dans des bars ou des boîtes rock, ils se forgent une petite notoriété dans Paris. C'est au Gibus, en novembre 1980, que le duo se présente sous le nom de Rita Mitsouko. En ce tout début des années 1980, leur insolence, leur folie et leur énergie font d'eux un groupe prêt à électriser la vie musicale française.
En 1981, sort un premier disque de quatre titres dont "Don't forget the nite". Ce premier essai n'est pas du tout une réussite commerciale, mais Philippe Constantin, directeur artistique de leur maison de disques Virgin, les sauve in extremis, d'une mise à la porte imminente. Il faut attendre quelques années avant le succès, et celui-ci sera alors retentissant.
Enregistré en Allemagne, c'est en avril 1984 que sort leur premier album éponyme. Pendant un an, il ne marche guère mieux que leur premier disque de 1981. Mais lorsqu'en 1985, paraît le simple "Marcia Baïla", un raz-de-marée musical s'abat sur le pays. Le succès est énorme et le 45 tours se vend à un million d'exemplaires. D'après la SACEM (Société des Auteurs Compositeurs), "Marcia Baïla" est le titre le plus programmé dans l'histoire de la radio. Ecrite en hommage à la danseuse argentine, Marcia Moretto, avec qui Catherine a travaillé, cette chanson fait danser la France entière sur des rythmes latino-rock. Le clip signé Philippe Gauthier est aussi un des plus célèbres des années 1980.
Suite à ce triomphe, les Rita Mitsouko entreprennent de nombreuses tournées en France mais aussi à New York ou au Japon. Sur scène, le groupe n'a pas peur de pousser ses délires parfois très loin. Le public est enthousiasmé par ce duo qui introduit sur la scène musicale un mélange d'influences très novateur. Le couple écoute toutes les musiques. Rock, funk, world-music, chanson traditionnelle, ils puisent leur matière première dans tous les répertoires. De plus, Fred Chichin est au faîte des innovations techniques.
En 1985, ils s'essaient à la musique de film et écrivent la bande originale de "Nuit d'ivresse" de Josiane Balasko. On retrouve le titre principal l'année suivante, en 1986, sur leur deuxième album, "The No Comprendo" que beaucoup considèrent comme leur meilleur disque, sinon un des meilleurs disques de la décennie. Enregistré sous la houlette du producteur anglais Tony Visconti, l'album renferme au moins trois tubes, "les Histoires d'A", "Andy" et "C'est comme ça", dont le clip de Jean-Baptiste Mondino est largement diffusé sur toutes les chaînes télévisées de France pendant de nombreux mois.
Les Rita Mitsouko repartent alors en tournée. Leur notoriété française et européenne traverse l'Atlantique, et les Américains raffolent vite de ce groupe français dont le rock iconoclaste et métissé fait fureur dans les clubs new-yorkais.
En 1987, sort le film "Soigne ta droite" de Jean-Luc Godard dans lequel le réalisateur a filmé les Rita Mitsouko pendant trois semaines lors de l'enregistrement de "The No comprendo" en 1986 dans un studio de Ménilmontant à Paris. La même année, le chanteur Marc Lavoine invite Catherine Ringer pour un duo sur le titre "Qu'est-ce que t'es belle".
Puis, en novembre 1988, le groupe sort son troisième album, "Marc et Robert", toujours produit par Tony Visconti. Malgré un son plus "dance", ce disque est sans doute le moins abouti. Le succès est moyen. On distingue cependant le titre "Le Petit train", reprise d'un air traditionnel, et dont le clip est tourné dans les immenses studios de cinéma de Bombay en Inde. En outre, les Rita Mitsouko ont invité sur cet album le duo américain des frères Mael, les Sparks. Ensemble, ils font un certain nombre de concerts et d'émissions de télévision lors desquels la folie des Rita Mitsouko alliée à celle des Sparks fait sensation et parfois dérange.
A partir des années 1990, les Rita Mitsouko vont un peu ralentir leur rythme sans toutefois cesser de travailler. Curieux de toutes les nouveautés musicales, ils tentent sans arrêt de nouvelles expériences avec des musiciens de tous horizons. En 1990, ils demandent à des DJ's de remixer une dizaine de leurs titres qu'ils compilent sur le disque, "Re". Parmi les DJ's mis à l'œuvre, on retrouve Tony Visconti, mais aussi l'anglais William Orbit ou le français Dee Nasty.
A partir du 4 décembre 1990, les Rita Mitsouko font un grand retour sur une scène parisienne, la Cigale, où ils s'installent pour quatre semaines. Ils instaurent même des matinées le dimanche après-midi pour les enfants.
Entre leur travail, quelques concerts et l'éducation de leurs deux petites filles, on n'entend guère parler d'eux jusqu'en 1992, année lors de laquelle le couple enregistre un nouvel album entre Essaouira, au Maroc, et Paris. Le résultat est dans les bacs des disquaires dès novembre 1993 sous le nom de "Système D". Album très attendu et présenté par la presse comme un événement, "Système D" n'est pas à la hauteur des attentes du public et de la critique. Outre un duo avec Iggy Pop ("My love is bad"), et une reprise de Serge Gainsbourg ("l'Hôtel particulier"), le duo revient tout de même au devant de la scène avec quelques beaux titres dont "Y'a d'la haine", "Get up get older" ou "les Amants", initialement écrit pour le film de Léos Carax, "les Amants du Pont Neuf". Ils rendent également hommage à James Brown, "Godfather of soul" et à leurs filles, "Chères petites".
La sortie du disque entraîne les Rita Mitsouko dans une nouvelle tournée qui passe par le festival des Transmusicales de Rennes en décembre, puis par l'Olympia pour quatre soirées (31 janvier puis 1,3 et 4 février 94).
Catherine Ringer interprète en 1995, la chanson titre du film des Inconnus, "les Trois frères". La même année, elle est l'invitée de l'accordéoniste Richard Galliano lors d'un concert à la Cité de la Musique à Paris. Forte d'une voix riche et magnifique, Catherine Ringer interprète à cette occasion des reprises de Charles Trenet, Mick Jagger ou un texte d'Arthur Rimbaud mis en musique par Léo Ferré.
Infatigables, les Rita Mitsouko ne cessent de jouer sur toutes les scènes de France et d'ailleurs. Des festivals les plus célèbres aux plus confidentiels, des lieux les plus prestigieux aux plus inattendus, toutes les expériences les tentent.
En février 1997, la Cité de la Musique donne carte blanche au groupe pour trois soirées. C'est donc entourés d'invités venus d'horizons fort différents, qu'ils interprètent un répertoire souvent inédit en public. Parmi les invités, on peut citer le jazzman américain Archie Shepp, le compositeur français Pierre Henry ou les rappeurs du groupe Assassin.
Quelques jours plus tard, sort un album enregistré en public le 30 novembre 1996 pour une émission de télévision de la chaîne M6. Cet album "Acoustique" renferme de nombreux tubes, mais aussi deux inédits et une reprise en duo avec le jeune chanteur Doc Gynéco ("Riche").
Sept ans après leur dernier album, les Rita réapparaissent sur la scène musicale en janvier 2000 avec un nouveau simple "Cool Frénésie". Il est en réalité extrait de l'album du même nom qui sort en mars. Entre les deux, le groupe donne une série de concerts "d'échauffement" qui leur permettent de tester leurs nouvelles chansons. Car Fred Chichin le reconnaît lui-même, il est difficile de se renouveler et de ne pas tomber dans les recettes faciles. D'où une période d'hésitations et de quête qui a conduit le duo à ne pas précipiter la sortie de l'album (voire à la retarder). Même s'il sait intégrer les nouvelles tendances (électroniques par exemple), le duo conserve son particularisme oscillant souvent entre gravité et humour, poésie et réalisme. En duo avec Jean Neplin, Catherine chante "Parle-moi". Elle évoque aussi son père ("C'était un homme") peintre d'origine juive polonaise. Le temps est peut-être venu d'une œuvre plus personnelle.
Fin février, le duo retrouve les planches et le public pour une tournée très attendue. Chacune de leur apparition est un événement et ce, depuis leurs débuts. On se demande toujours vers quelle folie leur show va-t'il mener. Mais Fred et Catherine se sont bien apaisés depuis les excès des années 1980. Début mars, c'est un concert de grande qualité mais très sage qu'ils offrent au public du Trabendo, ex-Hot Brass, à Paris. Après quelques dates dans des clubs rock à travers la France, on les retrouve de nouveau dans la capitale pour quatre dates à La Cigale du 26 au 29 avril. Puis en fin d'année, sur la scène des Folies Bergères du 4 au 11 décembre.
En novembre 2001, sort le premier "Bestov" des Rita avec quand même un inédit "Clown De Mes Malheurs", célébrant ainsi plus de 20 ans de carrière. A côté de cela, le duo travaille pendant ce temps sur un nouvel album. Les 20 et 27 janvier 2002, il se produit au Théâtre des Champs-Elysées pour un concert 'carte blanche' avec l’Orchestre Lamoureux sous la direction de Bruno Fontaine. Il revisite alors son propre répertoire et interprète aussi des chansons de Ferré et Gainsbourg.
Les Rita Mitsouko se produisent au Trabendo à Paris les 28, 29 juin ainsi que le 11 juillet, et dans divers festivals, Solidays et les Vieilles Charrues pendant l'été. Ils présentent ainsi en avant première, les chansons du nouvel album. En effet, en septembre sort "la Femme trombone", un ensemble de chansons avec des thématiques plus personnelles servies par des musiques toujours aussi éclectiques, rock, pop, funk ou électro. Les textes portent sur des sujets aussi variés que les problèmes de couple avec par exemple "Tu me manques", les femmes avec "Vieux rodéo" ou la société de consommation avec "Evasion". Le premier simple extrait de l'album s'intitule "Triton". Le duo commence dès septembre une tournée automnale qui passe le 20, par le grand Rex à Paris.
Si tôt la tournée terminée, Catherine Ringer se lance dans un projet solo et devient rôle principal de "Concha Bonita". Créée par Alfredo Arias, cette comédie musicale raconte l'histoire d'un jeune homme argentin qui change de sexe et devient une femme. Peu vu en France, le show est un succès mondial.
Fin 2003, le groupe repart sur les routes de France accompagné de l'orchestre Lamoureux. Ensemble, avec trente-huit cordes, deux cors, un hautbois, une clarinette, des percussions et un piano, ils revisitent le répertoire des Rita dans une orgie musicale où variété et classique s'unissent et se subliment. Ces concerts servent ensuite de matière pour un nouvel album live qui sort en mars 2004.
En octobre 2004, sur le DVD "Bon anniversaire Charles" qui célèbre les 80 ans de Charles Aznavour, au Palais des Congrès, on peut y voir Catherine Ringer chanter "La Bohème" en duo avec Corneille.
En 2005, le couple multiplie les collaborations. Fred Chichin remixe "Coulibaly" d'Amadou et Mariam, tandis que Catherine Ringer participe au sixième album de Thomas Fersen, "Pavillons des fous" pour le titre "Maudie" qui met en scène une folle de quartier, à qui la chanteuse déjantée prête sa voix.
L'année 2007 est celle du grand retour. "Variéty", nouvel album sorti en avril, célèbre la renaissance du groupe et la vitalité retrouvée de leur créativité. Fred Chichin avait en effet été fortement affaibli pendant deux années par une hépatite C. L'album, moitié français, moitié anglais, est né alors que Catherine Ringer devait partir en tournée en Italie avec "Concha Bonita", la comédie musicale d'Alfredo Arias. La maison de disques des Rita leur avait demandé de livrer un maxi avec au moins quatre titres pour faire patienter leur public. Mais, en écrivant une première chanson, une foule de morceaux sont apparus, simplement. Catherine Ringer a annulé sa tournée. Comme souvent, les Rita ont composé, chez eux avant de passer en studio. La direction artistique de ce disque a été partagée avec Mark Plati, le réalisateur new-yorkais des albums de David Bowie ou des Brazilians Girls.
Sur "Variéty", Catherine Ringer chante en duo avec Serj Tankian, voix du groupe américain System of Down, sa fille, Ginger, la vingtaine épicée, fait les chœurs sur certains titres. La grande nouveauté de ce disque est le désir affiché d'ouverture hors des frontières hexagonales. Deux versions du disque sont d'ailleurs disponibles, une en français Variéty, une en anglais, sans accent, Variety, pour rencontrer davantage le public européen et une innovation linguistique inattendue : Catherine Ringer s'essaie au mandarin dans le morceau La berceuse, une chanson qui a pour thème le cancer.
Parallèlement à la sortie de leur album, les Rita renouent avec le public parisien lors d'une série de concerts à la Boule Noire entre le 27 février et le 21 avril, onze concerts donnés à guichets fermés. Le 23 avril 2007, en pleine campagne présidentielle, les Rita fête leur vingt ans d'existence à la Cigale, avec un concert anniversaire mémorable. En 1987, ils avaient inauguré la mythique salle parisienne, alors que la peinture était à peine sèche.
En quelques titres, les Rita Mitsouko ont donné un coup de fouet à la chanson française. Malgré un certain apaisement de leurs folles prestations scéniques d'antan, le public reste très friand de ce rock vitriolé et de la superbe voix de Catherine Ringer.
Source : RFImusique
Biographie fournie par : Webmaster ABC-TABS
Dernière modification : 01/08/2011