Nous sommes en 1996, à Teignmouth, dans le Devon, lors du concours "Battle Of The Bands". Les groupes à tendance pop ou funk pop, typiques de la scène musicale de la région, se succèdent et se ressemblent... C'est dans cette ambiance que Matthew, Dom et Chris entrent en scène pour donner leur premier "vrai" concert, sous le nom de Rocket Baby Dolls. Vêtus de noir et maquillés outrageusement, ils électrisent l'atmosphère de leurs riffs frénétiques et concluent leur show agressif par la destruction de leur matériel. L'engouement du jeune public se fait ressentir ... et celui des juges également: les Rocket Baby Dolls l'emportent et c'est une belle victoire pour ces détracteurs de la scène funk locale. Venus participer sans nourrir le quelconque espoir de gagner, leur attitude et l'émotion dégagée par leur prestation aura su dépasser le manque de prouesses techniques. Première étape dans l'ascension fulgurante de Muse? Certainement... cette victoire leur permettait alors de découvrir que la musique était, avant tout, une histoire d'émotions.
C'est à Teignmouth, triste station balnéaire de 15000 habitants, que la Providence réunit Matthew Bellamy, Chris Wolstenholme et Dom Howard. La musique se révèle être, de toute évidence, une échappatoire à l'ennui et à une violence sous jacente. Jouer dans un groupe semble être une réaction naturelle, aidant à supporter le climat ambiant. Ainsi, vers l'âge de 12 ou 13 ans, un intérêt commun pour la musique réunit tout d'abord Matt et Dom, ce dernier jouant dans LE groupe populaire de l'école.
Devenu ami avec Dom, Matt rejoint son groupe dès que l'occasion se présente, en tant que guitariste/chanteur. Deux ans plus tard, l'instabilité propre au groupe, qui voit ses membres partir, revenir, changer, touche à sa fin avec l'arrivée de Chris. Les Gothic Plague (c'est alors leur nom) ont enfin trouvé un équilibre avec la présence de leur nouveau membre batteur reconverti en bassiste et cette fois, l'alliance restera immuable.
Rebaptisé successivement Fixed Penalty, puis Rocket Baby Dolls, le trio débute avec des reprises des classiques indé du début des années 90. Sans grand succès. Mais peu importe, loin de les décourager, le peu d'intérêt qu'on leur accorde les pousse, paradoxalement, à s'investir davantage, à écrire et composer leurs propres morceaux. A l'heure où la scène Britpop explose avec les nouveaux venus de Blur et Oasis, pour ne citer qu'eux, Matt, Dom et Chris s'en détournent pour s'intéresser à des groupes américains tels que Primus, les Smashing Pumpkins, Sonic Youth, Rage Against The Machine, Nirvana; bref, autant de références qui marquent définitivement leur jeunesse.
Seule exception brîtish mais notable: Radiohead; leur opus "The Bends" et "Nevermind" de Nirvana sont très certainement LES deux albums qui changent et orientent leur conception de la musique. Ils trouvaient enfin en eux un réel sens de l'innovation, une sincérité, une exploration personnelle qui les mettaient à part, aux antipodes du simple exercice d'imitation auquel se livrait la Britpop. Rapidement renommés Muse, les trois amis d'enfance commencent à prendre le groupe réellement au sérieux; plus qu'une issue de secours et un rejet de leur environnement culturel, social et géographique, la musique est désormais pour eux une passion, une manière de s'exprimer. Ils vivent alors au rythme des répétitions, de plus en plus intenses, et saisissent la moindre occasion de jouer devant un public quel qu'il soit. En effet, pas question de faire les difficiles quand on se trouve à 400 km du centre de Londres. Ainsi, ils se produisent régulièrement dans les pubs et les bars de leur région. "The Cavern" à Exeter reste le seul endroit convenable, mais il est malheureusement vide la plupart du temps. Ils investissent par ailleurs des dizaines d'autres lieux, souvent bondés de personnes âgées, qui, loin de leur réserver un bon accueil, les pressent de jouer des hits des années 60! Découragent? Pas vraiment ces expériences sont en fait un "moteur" et les aident à persévérer.
Alors que leurs amis poursuivent leurs études à l'Université, Dom fait de petits boulots sur des chantiers, Chris aide à tenir un magasin de guitares et Matt travaille en tant que peintre décorateur. Un choix d'avenir peu probant, mais qui leur laisse une certaine liberté et leur permet de se rapprocher davantage. Et leur motivation portera ses fruits... En effet, la rencontre avec Dennis Smith, propriétaire de Sawmills, magnifique moulin reconverti en studios d'enregistrement, en Cornouailles, sera le point de départ de leurs espérances les plus folles. Pour la petite histoire, il entend parler de Matthew (alors âgé de 13 ans) pour la première fois par l'intermédiaire de son garagiste, alors fasciné par les talents précoces du gamin. Néanmoins, il lui faudra quatre ans pour se décider, enfin, à aller voir le groupe sur scène et les aborder. Convaincu par la maturité et le potentiel qui se dégagent déjà du groupe, Smith se prend d'amitié pour le trio ... et l'aventure Muse peut alors vraiment commencer.
Commence alors un processus lent mais prudent, qui voit peu à peu Muse se frayer un chemin vers la capitale anglaise. Dennis Smith considère alors le groupe comme "un diamant pas encore tout à fait taillé" pouvant être détruit par une ville comme Londres. Bien heureux celui qui sait attendre... C'est en 1998 que les choses se concrétisent: Smith conclut un engagement avec le groupe; le studio (qui a vu de grands noms se succéder: Oasis, Robert Plant..) est à leur disposition à la condition qu'il soit remboursé dès l'obtention d'un contrat. Cette année là, le premier EP "Muse" sort sous le label de Sawmills, Dangerous Records, à quelques centaines d'exemplaires. Mais ce n'est pas avant le second EP "Muscle Museum" que le groupe attire l'attention d'un plus large public. Steve Lamacq, DJ et journaliste, est le premier à diffuser leurs morceaux sur une radio internationale. L'impact est alors inévitable: NME (New Musical Express), hebdomadaire anglais de référence dans la presse musicale, ne tarde pas à faire l'éloge de ces nouveaux venus. Parallèlement, Smith s'allie avec Safta Jaffrey, dont la société SJP réunit quelques unes des plus grandes pointures du pays en matière de production; ensemble, ils créent Taste Media spécialement pour Muse. Une réelle chance pour le groupe, qui peut préserver son autonomie dès le début de sa carrière.
Néanmoins, pas un seul label anglais ne montre d'intérêt pour Muse, malgré le succès de leur second EP et leurs prestations scéniques. Peur d'approcher un groupe "différent"? C'est aux Etats Unis que leur carrière pourra enfin décoller; Guy Oseary, de Maverick Records, voit en Muse une perle rare, à ne pas laisser filer. Ils ne regretteront pas leur crochet par Los Angeles, car fin 1998, ils sont signés sous le label de Madonna... c'est peu dire. Taste Media s'allie alors avec Naive pour la France, Mushroom pour la Grande Bretagne, l'Irlande et l'Australasie et enfin avec Motor/Universal pour l'Allemagne, l'Autriche et l'Europe de lEst. Un engrenage commercial rapide, après lequel John Leckie (producteur de "The Bends" de Radiohead) vient apporter sa contribution.
Le premier album de Muse est enregistré en quelques semaines à Sawmills et Rak (à Londres): "Showbiz' sort le 6 septembre 1999 en France, le 20 en Allemagne et le 4 Octobre en Grande Bretagne. Ils repartent pour les USA et cette fois ils jouent avec de grosses têtes d'affiche: Red Hot Chili Peppers, Foo Figthers, un public de 20000 personnes leur fait face chaque soir. Glastonbury, Reading, Woodstock, Muse participe aux plus grands festivals. C'est pourtant en France que le groupe reçoit le meilleur accueil; Showbiz se vend à 150.000 exemplaires. Ils jouent à Paris pour la première fois au New Morning, en juillet 1999, puis en novembre, au MCM Café, devant lequel près de 200 personnes sont rassemblées, pour eux ... un constat impressionnant pour un groupe qui commence à peine à faire parler de lui.
2000 sera l'année des tournées et des festivals (une cinquantaine environ) car le succès de Showbiz leur offre l'opportunité de silloner le monde: le mois de janvier sera marqué par deux dates parisiennes, l'Elysée Montmarte puis le Bataclan. En juillet et en octobre ils passent par le Japon, avant de faire escale en Australie pour cinq dates en première partie de Feeder. Près de 500.000 copies de leur premier album sont vendues, avec des chiffres à peu près semblables en Europe, au Japon et Australie, supérieurs en France, même... et pour ceux qui découvrent Muse, force est de constater que c'est un immense groupe de scène; une énergie, une intensité servies par un son unique et par une voix exceptionnelle... Thom Yorke, à qui Matthew est trop souvent comparé, n'a qu'à bien se tenir.
"Notre premier disque était celui d'un groupe à la recherche de son identité, le second nous montrera plus comme un groupe en train d'installer cette identité" (M. Bellamy).
Avec "Origin Of Symmetry", Muse a le mérite d'innover tout en restant dans la brèche ouverte par "Showbiz". Produit par David Bottril (Tool) et John Leckie, le nouvel opus des trois Anglais sort en juin 2001: fusion originale de divers styles sur une base rock, OOS est harmonieusement agrémenté d'orgues de cathédrale, de rythmes classiques mais aussi electro ... bref, un panel d'émotions condensées en une seule oeuvre. Avant même la sortie attendue de ce second album, Muse honore encore la France de sa présence: on les retrouvera début avril à la Cigale avec JJ72 et le lendemain au Printemps de Bourges, sans compter les nombreuses dates en province. Ils continuent de tourner en mai, de nouveau avec Feeder, et passent par la Suisse, l'Espagne, l'Italie, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, la Norvège... un programme chargé, qui continue en juillet avec de nombreux festivals et un concert aux Arènes de Nîmes avec PJ Harvey et Noir Désir.
Ils remettent les pieds sur la terre japonaise pour la promotion d'Origin of Symmetry et trois shows privés organisés par le Fan Club. L'accueil qui leur est réservé dans ce pays est plus qu'encourageant, surprenant même: en effet, l'album est directement classé numéro 1 des charts nationaux et numéro 19 des charts internationaux, égalant les ventes de Showbiz en deux semaines seulement. Un export fructueux... Muse semble sur la bonne voie pour devenir l'un des groupes britanniques les plus populaires au Japon. Le succès de la tournée Origin Of Symmetry qui s'ensuit en octobre/novembre est à la mesure de celui de l'album; une dizaine de dates en Angleterre, quatre en Allemagne, trois au Japon et ... six en France. Muse s'est constitué une base de fans solide.
Seul (petit?) bémol dans l'ascension de Muse: les Etats Unis. Premiers à reconnaître le talent du groupe, mais ironiquement, premiers aussi à s'en détacher. Origin Of Symmetry n'est finalement pas sorti vu le peu de succès du single Plug In Baby. Mais pourquoi Muse ne s'imposerait il pas là où des groupes anglo saxons comme Garbage ou Bush ont fait leurs preuves? Aussi, les trois de Teignmouth n'ont sûrement pas dit leur dernier mot... l'appui des Etats Unis en poche, le tableau de leur réussite sera complet.
Muse, en quelques mots? Une belle claque pour tous ceux qui ne voyaient en eux qu'une pâle copie de Radiohead ils ont su démontrer leur diversité et leur originalité ...
Origines: en 6 années d'existence, le trio anglais Muse est devenu une figure incontournable de la jeune scène rock internationale. Après 2 albums studio en 1999 et 2001, un album live en 2002, il est déjà de retour avec ce nouvel opus. L'édition limitée propose un DVD présentant le making of de l'album.
Muse est un des rares groupes anglais à allier la fureur metal américaine à la douceur pop anglaise. Avec Absolution, le groupe livre de bons morceaux parfois grandiloquents reposant, comme à son habitude, sur le chant exceptionnel de Matthew Bellamy et une section rythmique implacable. Les fans ne seront pas déçus, la machine tourne toujours à plein régime!
Source : MuscleMuse
Biographie fournie par : Webmaster ABC-TABS
Dernière modification : 25/10/2011