Né le 24 mai 1941 à Duluth au Minnesota, Robert Allen Zimmerman grandit à Hibbing, dans le même Etat. Ses grands-parents étaient des immigrants juifs d’Europe de l’Est. Son enfance dans cette région rurale marquera beaucoup son œuvre future, il la décrira plus tard comme empreinte du mysticisme d’une nature sauvage, où il se sent en contact avec les forces primordiales de la Terre. Il découvre à la radio le Blues et la Country, puis les premiers morceaux Rock and Roll, et en est suffisamment fasciné pour créer son propre groupe avec des amis. Devenu un musicien passionné, il fera même, encore lycéen, quelques tournées au sein de petites formations.
C’est à l’université du Minesota que Bobby Zimmerman commence à s’intéresser à la tradition de la Folk Music, « des chansons qu’on tient toujours de quelqu’un » comme il les définit lui-même. Quittant la faculté à la fin de sa première année, il prend le nom de Bob Dylan, déformation de son second prénom « Allen », et commence à jouer dans les bars et les clubs Folk de Minneapolis, développant son style de chant original et apprenant tout ce qu’il peut sur le Folk – ce qui n’est pas chose aisée à cette époque, où les disques Folk sont rares et précieux. Ayant gagné New York pour y rencontrer son idole, le chanteur anarcho-syndicaliste Woody Guthrie, il y est repéré par le légendaire producteur John Hammond (à ne pas confondre avec le chanteur du même nom), qui lui fait enregistrer son premier album (Bob Dylan, 1962), essentiellement composé de reprises Folk et Blues. Le disque ne remporte pas un succès fulgurant, mais Dylan a mis le pied dans la porte …
En 1963 et 1964, Dylan sort trois albums, développant son style poétique et gagnant une popularité hors du commun parmi le public Folk. Dès son second disque, The Freewheelin' Bob Dylan (1963), il mêle aux traditionnels Protest Songs Folk sa propre mythologie naissante et son sens unique de la poésie et de l’ambiguïté. Souvent considéré comme le chef d’œuvre de l’album, A Hard Rain’s A-Gonna Fall, est ainsi un long récit prophétique annonçant une « dure pluie qui va tomber ». Un avertissement sur les dangers de l’escalade nucléaire avec l’URSS ? Peut-être, mais cela peut aussi bien être la métaphore de sa vie amoureuse orageuse avec sa petite amie Suze Rotolo, qui apparaît sur la pochette. L’album contient également Blowin’ In The Wind, magnifique appel à la paix qui deviendra l’hymne de toute une génération d’opposant à la guerre du Viêt-Nam ... à travers l’interprétation du trio Folk Peter, Paul and Mary. En effet, le style vocal développé par Dylan, agressif et excentrique, est une véritable offense à l’industrie musicale de l’époque, et ses plus gros tubes du moment sont le fait d’autres artistes qui « embellissent » ses chansons, en donnant une version plus acceptable par un large public. C’est pourtant bien Dylan qui joue lors de la Marche pour les Droits Civiques de 1963, où Martin Luther King prononce un discours resté fameux.
C’est avec l’album suivant, The Times They Are a-Changin' (1964), que Dylan est définitivement bombardé “leader de la contre culture”. Il contient en effet des Protest Songs mémorables, comme le titre éponyme ou Only A Pawn In Their Game, récit de l’assassinat d’un militant des droits civiques qui n’était finalement lui-même, Dylan l’affirme, « qu’un pion dans leur jeu ». Mais si cet album est un succès, c’est au prix d’une certaine sophistication, laissée de côté pour satisfaire une maison de disque avide de chansons gauchistes … mais pas trop tout de même puisque ses compositions les plus féroces, telles le caustique John Birch Society Blues - depuis réapparu dans les Bootleg Series - sont fermement mises de côté par les hommes en gris.
Le sursaut ne tardera pas : dès 1964, Dylan commence à ébrécher sérieusement son image de gentil Protest Singer. De plus en plus attiré par son amour de jeunesse, le Rock and Roll, que de jeunes britanniques appelés Beatles court-circuitent allègrement depuis quelques temps déjà, il sort l’album Another Side Of Bob Dylan (1964) qui, s’il reste fidèle à l’idiome Folk guitare – harmonica, aborde des thèmes bien plus personnels, sur un mode fréquemment surréaliste. Le disque provoque des réactions très contrastées parmi les fans, qui commencent à l’accuser de trahir leur cause. En réalité l’album renoue avec la tradition issue de Frewheelin’, mais en tournant complètement le dos aux Protest Songs – il n’en écrira plus avant le milieu des années 1970 et il ne domineront plus jamais son œuvre. Avec le titre My Back Pages, il explique même qu’il renonce à « définir le bien et le mal ». Un travers qu’il parviendra à éviter pendant plus de 15 ans...
Fin 1964, Dylan n’y tient plus : ses concerts sont devenus une mascarade où il tourne en dérision ses anciens titres, ne jouant quasiment plus que des nouveaux, à l’étrange et sulfureux parfum, ce qui ne plaît guère à son public, avide de chansons révolutionnaires. Les Beatles, qu’il a rencontrés quelques mois plus tôt et initiés à la Marijuana, montrent l’exemple : l’avenir est dans l’électricité. Le pas est franchi en 1965 : il engage le guitariste montant de l’époque, Mike Bloomfield, le « Clapton américain » et enregistre un nouvel album, mi acoustique, mi électrique, Bringing It All Back Home. Le public Folk ne s’en remet pas et assassine l’album, pourtant encore assez proche des précédents, même sur les titres électriques. Mais Dylan enfonce le clou trois mois plus tard en faisant paraître Highway 61 Revisited. Entièrement électrique, l’album est un chef d’œuvre de Rock basique, joué à fond (pour l’époque). Les paroles laissent tous les critiques bouche bée : une étrange mythologie, où le rôle de Dieu est joué par … une autoroute (sur la chanson Highway 61 Revisited). S’il s’agit bien de Dieu. Qui peut dire ce que Dylan a dans la tête ? Dans Ballad of a Thin Man, un homme d’affaires cherche en vain la sortie d’un labyrinthe peuplé d’ « hommes nus » qui, en un étrange retournement de situation, voient en lui les monstres qu’ils sont à ses yeux. Le titre qui ouvre l’album, Like a Rolling Stone, dédiée (semble-t-il) à une vagabonde, a été plusieurs fois classé parmi les meilleures chansons de tous les temps. Et le son n’est pas en reste : là où les morceaux de l’album précédent n’étaient souvent que du Folk « électrifié », ceux ci atteignent un niveau musical digne des plus grands, avec guitares rageuses et orgues tortueuses.
Les anciens fans du chanteur sont bien sûr effondrés : pour eux Bob Dylan est la perpétuation d'une tradition solidement ancrée, entre musique américaine des origines et engagement syndicaliste, et le Rock, la musique commerciale, dansante et vulgaire, du moment. Ils ne sont pas au bout de leurs peines, car Dylan, soutenu par un petit groupe de Rock garage, les Hawks, qui deviendront plus tard The Band (le Groupe), part dans une tournée qui est à l’époque la plus longue jamais entreprise. Dylan joue ses nouvelles chansons partout dans le monde, et partout il est hué. Sa « trahison » provoque parfois de véritables batailles rangées dans les salles de concert. Le divorce est consommé : Dylan ne sera jamais là où on l'attend.
C’est au milieu de cette tournée apocalyptique, où le groupe joue plus fort que n’importe qui avant eux (« les deux choses les plus bruyantes qu’il m’ait été donné d’entendre, racontera un Marlon Brando enthousiaste, c’est un train de marchandises en train de dérailler et Bob Dylan avec le Band ») que Dylan s’arrête quelques semaines pour enregistrer ce qui restera pour de nombreux critiques comme l’un des meilleurs albums de musique populaire du XXe siècle : Blonde on Blonde. Enregistré en deux semaines de studio pendant lesquelles Dylan écrit souvent les paroles quelques minutes avant le début de la session, Blonde on Blonde, premier double album de l’histoire du Rock, est un étrange moment de calme au milieu de la fureur de cette époque. Voix et musique s’y fondent pour nous raconter toutes les dernières expériences de Dylan, vécues et rêvées, dans une ode à l’amour sous toutes ses formes, de la mère à la putain, en passant par l’amour illusoire que donne la drogue. Dylan est au sommet du monde, vibrant intérieurement de mille sensations étranges, et fait partager ses expériences dans cet album si surréaliste qu’il est difficile de le décrire. Un chef d’œuvre hors du temps qui fait de Dylan la locomotive du Rock and Roll : des Beatles aux Stones, tout le monde tente de lui emboîter le pas. Peu y arriveront.
En juillet 1966, la folle épopée Rock and Roll de Bob Dylan s’arrête plus brutalement encore qu’elle avait commencé : la moto Triumph Bonneville du chanteur sort de la route, l’envoyant à l’hôpital et l’écartant des scènes pour deux ans. Sérieusement calmé par cet accident, Dylan prend le temps de réfléchir sur sa vie et décide de tourner le dos à ces excès qui ont failli le tuer, laissant toutes sortes de rumeurs alarmistes circuler sur son sort : certains le disent mort, d’autres fou ou kidnappé par la CIA … Il s’amuse en réalité dans sa maison de Woodstock avec ses amis du Band, enregistrant des ébauches de chansons qui sortiront dans les années 1970 sous le nom de Basement Tapes.
Ce n’est qu’en 1968 que Dylan réapparaît aux yeux du public, avec John Wesley Harding, album acoustique apaisé. Le disque, qui a déçu à l’époque beaucoup de fans, est pourtant aujourd'hui considéré par beaucoup comme très bon. Il montre un Dylan moins surréaliste mais davantage intéressé par le passé de son pays et des histoires populaires nimbées d’un mystère irréel. Pour autant, les fans ne se sont pas calmés : Dylan est encore leur leader et ils attendent qu’il assume son rôle. Victime d’un véritable harcèlement, le chanteur tente de se réfugier à la campagne, puis de prendre un appartement anonyme à new York, mais rien n’y fait.
Cette starification dont il ne veut plus est sans doute en partie à l’origine des deux albums suivants, qui voient un Dylan habillé en cow-boy se lancer dans la Country pure et dure, avec le concours de son ami Johnny Cash. Les deux albums suivants, Nashville Skyline et le double Self Portrait, tout en ballades gentillettes et douces, consternent les fans : leur idole abandonne la contre culture pour devenir un tranquille père de famille. Il mettra des décennies à avouer (dans le premier tome de ses mémoires, paru en 2005) ce que dont beaucoup se doutaient : le coup était calculé pour se débarrasser à coup sûr d’une réputation trop envahissante et des fans qui vont avec. Pour autant les albums ne sont pas mauvais : réécoutés pour ce qu’ils sont, c’est à dire de la Country très orientée ballades, ils sont aujourd'hui appréciés par de nombreux amateurs.
Au début des années 1970, Dylan se consacre à sa vie de famille. Il sort un album très calme, New Morning, détesté à l'époque par la critique et aujourd'hui considéré comme moyen, participe au très controversé concert pour le Bangladesh et joue dans un western, Pat Garret and Billy The Kid, dont il écrit la musique. En grande partie instrumentale, cette BO contient tout de même un tube, Knocking On Heaven’s Door. Ce n’est que vers 1975, après un album souvent jugé décevant avec le Band (Planet Waves, qui contient tout de même le classique Forever Young), que Dylan commence à s’ennuyer, et décide donc de repartir en tournée.
Les concerts, dans de très grandes salles, sont énormes : Dylan est en grande forme, décidé à reconquérir ce titre de Rock Star auquel il avait lui-même renoncé quelques années plus tôt. Il chante de manière plus agressive que jamais, mâchant ses mots, mais le public n’en a cure : Dylan donne enfin l’impression d’être vivant et c’est l’essentiel. La tournée est suivie par un disque qui explique peut-être ce retour aux émotions fortes, car Dylan y conte son divorce avec sa femme Sara. Blood on the Tracks, sans doute l’un de disques les plus cathartiques du Rock, est depuis considéré comme l'un de ses chefs d’œuvre. Les chansons explorent toutes les facettes de la détresse amoureuse : l’apitoiement sur soi-même, la colère, les rechutes amoureuses … tout cela dans un style poétique inimitable et avec un tout nouveau son, synthèse parfaite entre l’ancien et le nouveau : acoustique certes, mais habillé de batteries, de basses et de claviers qui lui donnent une épaisseur terriblement poignante. Le disque remporte un grand succès, qui ne suffit pas à sortir Dylan de sa dépression mais ne lui enlève pas non plus son légendaire sens de la répartie : à une journaliste qui lui confie son enthousiasme, il rétorque qu’il ne voit vraiment pas comment on peut aimer expérimenter des sentiments tels que ceux exprimés par Blood on the Tracks …
Dès l’année suivante, le chanteur, décidemment de retour pour de bon, réunit ses vieux amis, parmi lesquels la chanteuse Folk Joan Baez, et part pour une tournée qui se veut épique et bohème, dans un esprit hippie déjà un peu dépassé à l’époque … Au début tout marche formidablement : la caravane, forte de dizaines de fêtards et de musiciens, fait escale dans de petites salles, joue avec des musiciens de bar recrutés sur place, un film est tourné … Tout ce bel enthousiasme finira hélas par retomber, mais non sans avoir produit son lot de musique d’exception : un live paru dans les Bootleg Series il y a quelques temps, et bien sûr l’album Desire, résultat de la coopération entre Dylan et le parolier (!) Jacques Levy. Cette étrange idée donne pourtant de très bonnes chansons, récits nimbés de mystères plein de pyramides, de gangsters et de voyous, habillées par une orchestration très riche où le violon, tenu par une musicienne rencontrée par hasard pendant la tournée, occupe une grande place. On y trouve même, pour la première fois depuis plus de dix ans, un Protest Song ! Hurricane raconte le procès d’un boxeur, Hurricane Carter, emprisonné pour meurtre, et que Dylan est résolu à faire libérer. Album à part dans la discographie dylanienne, Desire sera hélas le dernier grand disque de Bob Dylan avant près de trois décennies. Les années 1970 se terminent en effet avec Street Legal, qui nous montre un Dylan à nouveau déprimé et fatigué, et ne remporte pas un grand succès.
En 1979, Dylan opère un de ces retournements de situation spectaculaire dont il a le secret : du jour au lendemain ou presque, il se convertit au christianisme et se met à écrire sur sa toute nouvelle relation intime avec Dieu. Si le premier disque de cette période, Slow Train Coming, avec notamment Mark Knopfler à la guitare, se révèle sympathique, on ne peut en dire autant de la suite : sur les désastreux Saved et Shot Of Love, il écrit ses pires textes, qui semblent directement recopiés dans un livre de cantiques sans aucun ajout personnel ou presque, chante d’une voix brisée et habille sa musique de cœurs et de cuivres assourdissants. Universellement haïs, sauf par quelques uns qui les apprécient pour des raisons religieuses, ces albums donnent encore aujourd’hui lieu à controverse : Dylan a-t-il à nouveau tenté d’éloigner ses fans trop envahissants par des disques volontairement mauvais ? Au vu de certains de ses propos récents, cette hypothèse semble se confirmer …
En 1983, Dylan met fin à sa période chrétienne aussi brutalement qu’il l’avait inaugurée, et enchaîne étrangement avec Infidels, un disque considéré comme moyen dont les thèmes tournent autour … du judaïsme. Les années 80 n’ont notoirement pas été la meilleure période pour les grands artistes Rock des années 1960 et 1970, et Dylan ne fait pas exception à la règle : ses albums sont le plus souvent gâchés par le son discoïde de l’époque, qui ne leur convient particulièrement pas, et ses concerts par le manque de conviction qu’il met désormais à chanter. De son propre aveu, le chanteur a perdu quelque chose de ce qui faisait son génie : les chansons ne viennent plus avec la même facilité qu’avant, et son enthousiasme est usé. La fin de la décennie le trouve associé avec le Grateful Dead pour une série de concerts, et l’énergie semble l’habiter à nouveau. Sur les conseils de Bono, chanteur de U2, il enregistre ensuite avec le producteur Daniel Lanois, connu pour son approche « à l’ancienne », un album, Oh Mercy, qui marquera son « grand retour ». D’autre part, en 1988, Dylan a fondé les Traveling Wilburys, super-groupe regroupant, sous des pseudonyes, Dylan, George Harrison, Jeff Lynne, Tom Petty et Roy Orbison. Le groupe se séparera en 1990 après 2 albums d’un Rock and Roll simple mais éminemment sympathique.
Alors que sa maison de disque commence à éditer des coffrets regroupant ses archives les plus attendues depuis des décennies, Bob Dylan débute la décennie 1990 par un retour aux sources les plus profondes de sa musique, avec les albums Good As I Been To You et World Gone Wrong, entièrement composés de reprises de très vieux et souvent très obscurs titres Folk et Blues. Mieux qu'un nouveau retournement, un pur retour aux sources. Et la critique, enfin, suit.
En 1997, Dylan s’associe à nouveau avec Daniel Lanois pour enregistrer Time Out Of Mind, premier album de compositions originales depuis sept ans, qui sera salué comme son meilleur depuis Desire. Peuplé de compositions habitées, animé par un son profond typique de Lanois, Time Out of Mind est une chronique désespérée mais bien vivante de la vieillesse d’une Rock Star. Dylan y pose un regard sans complaisance sur son âge, évitant au passage les clichés Rock and Roll cultivés jusqu’au ridicule par certains autres « dinosaures » du Rock.
Vu le ton très mélancolique de ce disque, on aurait pu craindre qu’il s’agirait de son dernier. Crainte dissipée en septembre 2001 par la sortie de Love and Theft, dernier album en date salué encore une fois comme un succès. Très bluesy et jazzy, dépouillé et proche du son de ses concerts, ce nouvel album est de plus bien plus enthousiaste que ses prédécesseurs, il s’agit même du premier album de Dylan depuis des années à n’être pas nostalgique !
Depuis 2001, Bob Dylan n’a pas sorti d’album, mais il n’est pas resté inactif pour autant. Il enchaîne en effet depuis la fin des années 1980 un nombre étonnant de concerts sur les cinq continents, davantage que n’importe quel autre artiste de sa génération, à un rythme qui s’est encore accéléré ces dernières années. Ce Never Ending Tour (la Tournée Sans Fin), comme le surnomme Dylan lui même, est l’occasion pour lui de revisiter ses standards en laissant la part belle à l’improvisation : son groupe change de morceaux tous les soirs, et ne rejoue quasiment jamais une chanson de la même façon d’un soir sur l’autre.
D’autre part, alors que Martin Scorcese lui consacrait un film applaudi par la critique, Dylan a écrit la première partie de ses mémoires. Surprenant comme toujours, ce volume insiste sur des périodes mal connues de sa vie, comme ses tout débuts à New York et l’enregistrement de Oh Mercy en 1989. La parution régulière de ses Bootleg Series, pirates jadis introuvables, remasterisés et désormais officiels, dont la source paraît intarissable, ravit les fans en levant le voile sur des enregistrements légendaires disponibles pour la première fois. Et des rumeurs de nouvel album circulent avec de plus en plus d’insistance sur Internet …
Depuis quelques temps, ces rumeurs se sont concrétisées, avec l'annonce par Columbia Records, maison de disque de Dylan depuis ses début, de la sortie le 28 août prochain de l'album, Modern Times, qui constitue le 3e volet d'une trilogie commencée en 1997 avec Time out of Mind. Produit par Dylan lui-même et enregistré dans des conditions quasi live avec le groupe qui l'accompagne sur scène, ce nouvel album retrouve les accents jazzy, ragtime bluesy et rockabilly de son précédent opus "Love and Theft", dans une ambiance plus feutrée toutefois. Dans une prose biblique parfois surréaliste, matinée de références au monde contemporain ( à travers des évocations de l'ouragan Katrina, ou du 11 septembre par exemple et une citation à la jeune star du RnB Alicia Keys) Dylan y revisite à travers 10 titres phares les influences musicales de son jeune âge, endossant avec aisance et une délectation non dissimulée, le costume de la tradition musicale américiane du siècle qui l'a vu naître. Ue façon de contribuer a l'édification par les nouvelles générations de sa statue de commandeur des temps modernes...
Bob Dylan est l'un des artistes américains ayant influencé le plus la musique des années 1960 à nos jours: Beatles, Byrds, Neil Young, Eric Clapton, Jimi Hendrix, Lou Reed, Paul Frederic Simon, Springsteen ou Patti Smith ont subi son influence et ont repris ses chansons, comme plus récemment les White Stripes.
Ses textes, qui se situent entre la poétique surréaliste et la tradition musicale américaine, sont depuis plusieurs années l'objet d'études universitaires pointues. Son œuvre en perpétuel devenir (il revisite régulièrement chacun de ses standards dans différents registres allant du Rock agressif au Jazz en passant par les ballades) est l'une des plus marquantes de l'après-guerre.
D'une profondeur hors du commun, l'oeuvre de Bob Dylan opère la synthèse entre les musiques traditionnelles qui ont accompagné l'édification de l'Amérique et la modernité la plus avant-gardiste : L'Ouest profond et Greenwich Village. Il est l'un des artistes qui ont le plus révolutionné la musique populaire dans les années 1960 et 1970, contribuant à l'élever au rang d'un véritable art. Son influence déborde même du cadre de la musique, s’étendant à la littérature, au cinéma et même à la politique, puisqu’il fut, de manière plus ou moins involontaire, l’un des leaders de la contre-culture de cette époque.
Dès ses débuts en 1961, Dylan fait parler de lui dans les milieux Folk américains en adoptant une manière de chanter très expressive, qui surprend encore parfois aujourd'hui, loin des standards de la "belle" chanson. Souvent accusé de "ne pas savoir" chanter, Dylan est en réalité l'un des artistes modernes à avoir le plus fait progresser l'usage de la voix, l’employant comme un véritable instrument de musique et recherchant davantage l'expressivité que la beauté classique. Il a notamment considérablement expérimenté sur l'usage des dissonances, se faisant ainsi l’héritier direct des bluesmen des années 1930 comme Howlin’ Wolf.
D'un point de vue musical, même si ses compositions restent le plus souvent relativement "classiques", il a contribué, au côté d'artistes comme Eric Clapton ou les Rolling Stones, à faire entrer la musique traditionnelle américaine - Blues, Folk, Country ... - dans l'ère moderne, inspirant quasiment tous les autres artistes de son époque. Les disques de sa « première époque Rock », entre 1965 et 1966, sont particulièrement marquants sur ce point.
Mais le domaine dans lequel Dylan a eu l’importance la plus cruciale est sans conteste celui des textes. Dès son deuxième album (le premier étant presque entièrement composé de reprises, comme cela se pratiquait très couramment à l’époque), Dylan a imposé une manière d’écrire des chansons totalement unique à son époque, et très rarement égalée depuis. Inspirés par la littérature, la poésie surréaliste, mais aussi les "folksongs" réalistes de la grande tradition américaine, ses textes dessinent un univers intérieur d’une richesse exceptionnelle. Dès le début, le thème principal de l’œuvre de Dylan est son expérience personnelle du monde, sa vision des choses, qu’elle soient réelles ou fantasmées.
Le surréalisme qui imprègne profondément la plupart de ses textes, même les plus simples, atteindra son apogée en 1965 et 1966 lorsque Dylan délaissera le Folk pour le Rock and Roll. Libéré de toutes les contraintes du format Folk, sa créativité dopée par les drogues, il écrit alors plusieurs chefs d’œuvre qui le placent tout simplement parmi les plus grands poètes du XXe siècle. Loin d’être incompréhensibles et absurdes, comme ils sont parfois considérés, les textes de cette époque ne cherchent pas à avoir un sens figé, mais à décrire des impressions et des sentiments au delà des mots. Comme un tableau abstrait, ils peuvent acquérir un sens différent selon l’humeur de l’auditeur, tout en conservant une très forte identité propre. En cela, les mots de Dylan s’approchent de l’essence même de la musique, qui tire une partie de son pouvoir du fait qu’elle est le seul art à n’être aucunement figuratif. A une époque où la plupart des chansons populaires, et particulièrement les chansons Rock, parlaient encore de filles, de voitures et d’aventures sentimentales, les textes de Dylan ont provoqué un véritable tremblement de terre dont les répercussions se font encore sentir aujourd’hui. Elles ont considérablement influencé l’ensemble des artistes Pop de l’époque, au delà de l’univers du Rock and Roll et même de la musique, et ont changé de manière radicale la carrière d’artistes aussi talentueux que les Beatles.
Enfin, par ses textes, ses prises de position, mais aussi son attitude envers son statut de star et de musicien, Bob Dylan a joué un rôle très important sur l’évolution de la société dans la seconde moitié du XXe siècle. Adulé comme un messie par le public Folk et les milieux révolutionnaires de gauche du début des années 1960, il a refusé d’assumer ce rôle, préférant inciter ses fans, comme il l’exprime clairement dans certains de ses textes et en filigrane dans quasiment tous, à penser par eux-mêmes et à renoncer aux messies, de quel bord qu’ils soient. En refusant de participer aux jeux du business de la musique, en changeant sans cesse d’orientation musicale, ce qui lui a régulièrement valu d’être accusé de "traîtrise" par ses anciens fans, il a changé l’image du musicien populaire, faisant entrer la musique Pop de plain-pied dans le monde des arts « sérieux ».
Même ses errements artistiques, comme ses disques des années 1980, où il inventa le Rock chrétien, étaient semble-t-il surtout une tentative d’en finir avec l’idolâtrie dont il était l’objet depuis les années 1960. Certes, la complexité de l’œuvre de Dylan l’a empêché d’être un très gros vendeur de disques, et donc de toucher un public aussi large que d’autres vedettes de la Pop. Mais en influençant de manière directe presque tous les artistes de son temps, il a considérablement pesé sur le devenir d’une musique qui a changé la vision du monde de millions de personnes à travers le monde.
Source : Wikipedia.fr
Biographie fournie par : Webmaster ABC-TABS
Dernière modification : 20/09/2011